Le Cane Corso vu par un agronome Romain

"CAVE CANEM" "ATTENTION UA CHIEN" mosaique romaine Heracleum  - Italie
Voici un extrait d'un volume de Re Rustica Lucius Iunius Moderatus Columella dit "Columelle" est un célèbre agronome romain du milieu du Ier siècle, le Re Rustica en douze volumes est l'ouvrage principal de Columelle qui nous est entièrement parvenu. Son thème principal est l'agriculture et l'exploitation des latifundi à l'époque romaine. Avec le De agricultura de Caton l'Ancien, dont elle est d'ailleurs inspirée, elle représente la source la plus importante d'information sur l'agriculture romaine.

Le premier livre traite de l'utilité et de l'agrément de l'économie rurale ; le second, des champs, de la manière de les ensemencer, et de la moisson ; le troisième, des vignes et des vergers ; le quatrième de la culture des vignobles ; le cinquième de la manière de diviser et de mesurer le temps ; le sixième, des bestiaux et de leurs maladies ; le septième, du petit bétail ; le huitième, de la basse-cour ; le neuvième, de l'apiculture ; le dixième, écrit en hexamètres, des jardins ; le onzième, des devoirs du fermier ; le douzième, d'instructions et de recettes nécessaires à ceux qui s'occupent d'économie rurale.
Extrait du VIIème tome qui concerne une description très détaillé de référence pour tout amateur de molosse italique. Sélection et emploi qui finalement évolura très peu en 2000 ans d'histoire pour les CANIS VILLATICI.


"....CHIENS

XII. Si je ne me trompe, j'ai traité avec assez d'exactitude du gros et du menu bétail, ainsi que des gardiens,qui, tant dans la ferme qu'au dehors, doivent consacrer tous leurs instants aux soins et à la surveillance que réclament les troupeaux et les quadrupèdes. Ainsi que je l'ai promis dans le livre précédent, je vais maintenant parler des gardiens muets, quoique ce soit à tort que l'on qualifie ainsi le chien : car quel est l'homme qui annonce plus clairement et d'une voix plus forte les bêtes féroces et les voleurs, que ne le fait le chien par son aboiement? quel domestique aime plus san maître? quel compagnon est plus fidèle? quel gardien plus incorruptible? Peut-on trouver une sentinelle plus vigilante? enfin, y a-t-il un défenseur et un vengeur plus courageux? C'est pourquoi un des premiers soins du cultivateur est de se pourvoir d'un chien, et de le bien entretenir, puisqu'on lui confie la garde de la métairie, des produits de la terre, de la famille et des troupeaux.


ll y a trois choses à considérer dans son acquisition et dans son entretien. En effet, une espèce de chiens a pour mission d'éventer les embuscades dressées par des hommes, et de garder la métairie et ses dépendances; une autre espèce, celle de repousser les attaques des malfaiteurs et des bêtes féroces, et de veiller dans l'intérieur de la ferme sur les étables, au dehors sur les bestiaux qui paissent ; quant à la troisième espèce, on ne l'achète que pour la chasse, et, loin d'être utile à l'agriculteur, elle le détourne de ses travaux et les lui fait prendre en dégoût.

Nous ne parlons donc que du chien de garde et du chien de berger : le chien de chasse n'appartient pas à notre profession. On choisira pour garder la métairie un chien qui ait le corps très ample, l'aboiement fort et sonore, afin qu'il épouvante le malfaiteur d'abord par sa voix et ensuite par son aspect ; ses hurlements même devront inspirer assez de terreur pour mettre souvent en fuite, sans qu'il en soit aperçu, ceux qui tendraient quelqu'embûche. Il faut qu'il soit d'une seule couleur : on préférera la blanche dans le chien de berger, et la noire pour celui de ferme : pour l'un et l'autre emploi, on ne fait aucun cas de ceux qui sont bigarrés.
mosaique romaine Heracleum  - Italie
Le berger choisit le blanc, parce que cette couleur diffère de celle des bêtes féroces, et que, pour repousser les loups, soit par les matinées sombres, soit au moment du crépuscule, il est souvent utile que la couleur diffère beaucoup de celle de ces animaux : en effet, si la couleur blanche ne le faisait reconnaître, on serait exposé à diriger sur le chien les coups destinés aux loups. Quant au chien de garde que l'on oppose aux mauvaises entreprises des hommes, il doit être noir, parce qu'il paraîtra plus terrible au voleur s'il fait jour, et que la nuit, il ne sera pas aperçu à cause de l'analogie de sa couleur avec celle des ténèbres, sous la protection desquelles il parviendra avec plus de sûreté à surprendre le malfaiteur en embuscade. On estime plus un chien de taille moyenne qu'un chien long ou court; il doit avoir la tête si forte qu'elle paraisse la principale partie de son corps, les oreilles renversées et pendantes, les yeux noirs ou verdâtres, et d'une lumière éclatante, la poitrine ample et velue, les épaules larges, les jambes épaisses et couverte d'un poil dur, la queue courte, les doigts des pattes et les ongles très développés : ce que les Grecs appellent δρακαί. Telles sont les qualités que l'on prise le plus dans le chien de ferme.

Il ne sera pas d'un caractère trop doux ; mais, toutefois, ni farouche ni cruel ; parce que, dans le premier cas, il pourrait aller caresser même les voleurs, et dans le second attaquer jusqu'aux gens même de la maison. Il suffit qu'il soit sévère, et non caressant, qu'il regarde quelquefois d'un oeil irrité ses compagnons de servitude, et toujours avec fureur les étrangers. Surtout il doit se montrer vigilant dans sa garde, sédentaire et non vagabond, et plutôt prudent que téméraire : car le prudent n'annonce rien dont il ne soit sûr, tandis que le téméraire crie sur un vain bruit et d'après des soupçons mal fondés.

J'ai cru devoir entrer dans ces détails, afin que, le caractère n'étant pas seulement l'ouvrage de la nature, mais encore celui de l'éducation, on puisse, si on se trouve dans le cas d'en acheter, les choisir tels que nous venons de les dépeindre, ou, si on en élève qui soient nés à la maison, les dresser d'après ces principes.

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Il importe peu que le chien de garde soit pesant et peu alerte, puisque c'est plutôt de près et sur place, qu'au loin et par de longues courses, qu'il doit servir. En effet, il doit toujours se tenir dans l'enclos et près des bâtiments, surtout ne pas s'écarter, et il lui suffit, pour bien remplir ses fonctions, de flairer avec sagacité les survenants; de les effrayer par ses aboiements, de ne pas souffrir qu'on l'approche de trop près, et de se jeter violemment sur quiconque persiste à avancer : car le premier devoir du chien est de ne pas se laisser surprendre, et le second de se venger des attaques avec vigueur et persévérance. Voilà ce qui concerne le chien qui garde la maison; occupons-nous maintenant du chien de berger.

Ce dernier ne sera ni aussi maigre ni aussi vif à la course que celui qu'on lance à la poursuite des daims, des cerfs et des autres animaux de grande vitesse; il ne sera, non plus, ni aussi gras ni aussi lourd que le chien dont l'emploi est de garder la ferme et les greniers;

toutefois il doit être robuste et, jusqu'à un certain point, alerte et courageux, puisqu'il est destiné à l'attaque, au combat et aussi à la course : car il doit éventer les embuscades des loups, poursuivre dans sa fuite l'animal ravisseur, lui disputer. et lui enlever sa proie. En conséquence, pour être propre aux services qu'on attend de lui, sa taille devra être plutôt allongée et svelte que courte ou même moyenne, parce que, comme je l'ai dit, il est quelquefois obligé de forcer les bêtes à la course. Les autres qualités requises pour cette sorte de chien sont les mêmes qu'on exige pour le chien de garde.

On donne aussi à l'un et à l'autre une nourriture à peu près semblable. En conséquence, si les champs ont assez d'étendue pour comporter plusieurs troupeaux de bestiaux, on nourrira très bien les chiens, sans distinction, avec de la farine d'orge détrempée dans du petit-lait. Si, au contraire, le terrain est couvert d'arbres et sans pâturages, on composera leur nourriture de pain soit de far, soit de froment, que l'on trempera toutefois de bouillon de fèves qu'on aura soin de n'employer que tiède : car, s'il était très chaud, il leur donnerait la rage.

On ne permet l'accouplement à la femelle, comme au mâle, que lorsqu'ils ont un an accompli : si on le souffrait plus tôt, il leur énerverait le corps et les forces, et affaiblirait leur courage. La première portée de la chienne doit lui être enlevée, parce que, novice encore, elle allaiterait mal, et que la fatigue occasionnée par ce travail ne permettrait pas à son corps de prendre tout son développement. Les mâles conservent jusqu'à dix ans assez de jeunesse par engendrer; après ce temps, ils ne paraissent plus propres à couvrir les femelles, parce que les jeunes chiens qui sortent de vieux auteurs sont toujours lâches. Les chiennes conçoivent jusqu'à leur neuvième année, et ne propagent plus après dix ans.

Dans les six premiers mois, pendant leur accroissement, il ne faut pas laisser courir les jeunes chiens, à moins que ce ne soit pour jouer et folâtrer avec leur mère; passé ce temps, il faut les tenir enchaînés tout le jour, et les lâcher pendant la nuit. On ne doit jamais permettre qu'une nourrice étrangère allaite les chiens dont on veut conserver la bonne espèce dans toute sa pureté : en effet, le lait et le caractère de la mère produisent toujours un meilleur effet sur le caractère et les forces du corps de son petit.

Si, après avoir mis bas, une chienne vient à manquer de lait, il conviendra de donner, préférablement à tout autre, du lait de chèvre aux jeunes chiens jusqu'à ce qu'ils aient quatre mois. Il ne faut pas leur donner des noms trop longs, afin qu'ils les entendent plus promptement lorsqu'on les appelle, ni de plus courts que ceux que l'on énonce en deux syllabes : tels que Σκύλαξ (Jeune chien) en grec, Ferox (Fier) en latin; Λάκων (Chien de Laconie) en grec, Celer (Léger à la course) en latin; ou, s'il s'agit d'une femelle, Σπουδὴ, Ἀλκής, Ῥώμη (Zèle, Vaillance, Force) en grec, Lupa, Cerva, Tigris (Louve, Biche, Tigresse) en latin.

Quarante jours après leur naissance, on coupe la queue aux chiens. Il existe un nerf qui s'étend à travers les vertèbres de l'échine jusqu'à la dernière articulation de leur queue : on le saisit avec les dents, et, après l'avoir un peu tiré à soi, on le rompt. Moyennant cette précaution, la queue ne se prolonge pas désagréablement, et, comme l'affirment plusieurs bergers, les chiens sont préservés de la rage, qui, pour eux, est une maladie mortelle. ....."

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